L’affaire
Léonarda est un cas d’école pour comprendre comment on arrive en France à un incroyable
empilement de ménages déboutés de la demande d’asile qui quelque part contribue au développement du Front National.
D’abord
elle éclaire les conséquences des failles d’un système d’instruction des
demandes d'asile qui permet à une famille usant de dissimulations grossières de
sa situation administrative réelle, de bénéficier pendant quatre années de la
prise en charge des institutions françaises.
Ensuite
elle illustre on ne peut mieux, et cette fois-ci au plus haut niveau de l’Etat
et de la représentation nationale, les incroyables empoignades émotionnelles et
verbales auxquelles donnent lieu la simple application de la loi en matière de
fin de séjour.
C’est
exactement la même chose qui se joue au niveau local où fonctionnent à plein régime les
pressions des groupes militants auprès des politiques pour empêcher la mise en
application des obligations de quitter le territoire (OQTF).
Résultat
: le rapport sur l’hébergement et la prise en charge des demandeurs d’asile,
que l'on lira avec intérêt pour bien mesurer la complexité des enjeux et le dramatique de la situation, estime à environ 37.000 le nombre de déboutés de la
demande d’asile qui se maintiennent chaque année sur le territoire… ce qui depuis
2010 représente environ 120.000 personnes entassées dans le n'importe
quoi car les budgets n'arrivent pas à suivre !
Les
budgets de l'hébergement explosent, la ministre du logement qui a suivi les
recommandations des associations en annonçant à sa prise de fonction la
pérennisation des dispositifs hivernaux et la garantie de solutions à long
terme pour les bénéficiaires à mis le doigt dans un engrenage qui la dépasse
puisque l'effet a été une augmentation de 30% des arrivées de demandeurs venus pour certains dans l'espoir de bénéficier de ces engagements. Mais ses
budgets ne peuvent pas suivre puisque comme nous venons de l'évoquer très peu
repartent lorsqu'ils sont déboutés de leur demande et viennent grossir les besoins de prise en charge créant des tensions récurrentes dans la gestion des associations, saturant l'ensemble des
structures d'accueil de jour, humanitaires etc. D'autre part, autre effet
désastreux, le développement de la "débrouille de survie"
légitime de la part de ménages sans droits hormis l'Aide Médicale d'Etat, mais qui fait exploser
les actes de petite délinquance auxquels sont très sensibles nos concitoyens,
qui devant les discours d'une classe politique minimisant ces réalités se
tournent de plus en plus vers un Front National qui en fait ses choux-gras.
Car au fond ce qui se révèle quand on
creuse un peu la chose, c’est l’impensée généralisée de la question de
l’immigration dans la gauche en général et au parti socialiste ou chez les
verts en particulier. On se contente d’une posture morale qui semble n’être que
le prolongement d’une posture traditionnelle de résistance aux conduites d'une droite autrefois colonialiste et fascisante. La lutte contre l’immigration clandestine serait un thème de
droite voir d’extrême droite qu’il faut combattre au nom des grands principes
républicains et humanistes, point final ! Point nécessaire donc d'aller
plus loin et de se livrer à une analyse sérieuse des enjeux contemporains qui
n'ont plus rien à voir avec ceux d'il y a un quart de siècle.
Par exemple et connaissant le problème Isérois je
suis frappé de voir les responsables de la gauche locale se limiter dans leurs alertes à la problématique de la régionalisation, comme si la déconcentration des
problèmes d’accueil et d’hébergement, c'est-à-dire leur dispersion sur un plus
large territoire pouvait tenir lieu de solutions aux problèmes existants !
Au fond la sensibilité dominante de
la gauche au sens large c’est "qu’on ne peux pas renvoyer de chez nous des
familles fragiles, cela évoque par trop de mauvais souvenirs que l’on associe
au nazisme, au fascisme, aux rafles, à Vichy, à la droite, au colonialisme… et
peu importe qu’il en arrive cent ou deux cent milles, on ne peut tout simplement pas humainement parlant les
renvoyer". Et il suffit de voir la violence verbale et le débordement de bons sentiments que ces sujets
déclenchent pour comprendre le peu d’empressement de la plupart des politiques à
sortir de cette ligne convenue.
Du coup l'affaire Léonarda est une
grande première, où pour une fois un ministre résiste à la colossale pression
de ses "amis", faisant preuve de beaucoup de sang-froid et
pédagogie pour maintenir le cap et fragiliser les discours essentiellement émotifs et sans arguments de fond de ses
détracteurs.
Il serait
temps que les responsables de la gauche s’attellent à une vraie analyse de fond de la situation, pour dépasser la seule posture morale, trop distanciée des réalités du terrain qui ouvre
une voie royale aux extrémistes de tout poil.
Certes la
pression migratoire est colossale, tout comme la misère économique à notre
porte et nous avons le devoir de nous ouvrir à l’accueil des personnes menacées
dans leur intégrité. Mais sans l'existence d'un marché du travail porteur, le
maintien sur le territoire des ménages déboutés de la demande d’asile par
incapacité à faire respecter la loi, embolise complètement l'aide sociale par l'hébergement dédiée aux ménages du territoire dans le besoin, elle fait le lit du Front National et contribue
au développement du racisme et de la violence des aigris et des médiocres.
Manuel
Valls, si les vociférateurs voulaient bien le voir, représente donc une chance pour
la gauche de pouvoir concilier une fermeté en prise avec les réalités du
terrain et une attention au respect de la dignité humaine nécessaire à tous les
niveaux de l’application de la loi en la matière. Il y a urgence car la situation est
terriblement explosive.
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